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L'Histoire n'est qu'une histoire à dormir debout
21 juillet 2008

George Sand et Nohant

J’ai été marquée par Nohant dès mes 11 ans. A l’époque, je n’avais aucune idée de qui était George Sand, j’écrivais encore « George » avec un « s » et je pensais que c’était un homme, peut-être un Anglais. Bref, j’avais tout faux.

Lorsque je suis arrivée dans cette grande maison, ni trop prétentieuse, ni trop chiche, j’ai pensé que j’aimerais bien y vivre : tout était prêt à m’accueillir. La table était mise et j’aurais eu à mes côtés Alexandre Dumas fils – je ne savais pas encore non plus que c’était l’auteur de la Dame aux Camélias, et non pas des Trois mousquetaires – et pourquoi pas Tourgueniev, que je confondais sans vergogne avec l’auteur de Guerre et Paix, alors qu’il est celui de Père et Fils. Il n’y avait que Flaubert que je connaissais vaguement, et encore, je croyais que Madame Bovary était l’auteur du roman, et non pas un titre. Ce que j’étais inculte ! J’avais lu un condensé du Roman de la Momie de Théophile Gautier, et j’ai pu aisément reconnaître l’homme qui avait réclamé un peigne à George Sand un soir, et qui en avait obtenu un nombre considérable le lendemain. J’avais aussi une notion vague des tableaux de Delacroix, que j’imaginais pourtant plus flous qu’ils ne sont en réalité.

Cela fait neuf ans maintenant, et j’ai comblé mes lacunes. J’ai lu Flaubert, j’ai lu Alexandre Dumas fils pour compléter la dynastie, il n’y a que Tourgueniev qui manque encore à ma bibliothèque. Mais surtout, j’ai lu Sand. Ce n’est pas tant sa littérature que j’apprécie. Elle est souvent un peu trop champêtre à mon goût et je suis plus encline à lire un Zola urbain (même si La Terre est un excellent roman de Zola). C’est plutôt son personnage qui m’interpelle : une force de caractère, un esprit courageux, des réflexions souvent profondes et une capacité à attirer les hommes talentueux et inspirés. Un monde d’artistes gravitait autour d’elle, comme les planètes gravitent autour du soleil. Parfois, il y avait des incidents : des brouilles avec Mérimée suite à une nuit d’amour décevante, avec Liszt et Marie d’Agoult après avoir été les meilleurs amis du monde, avec sa fille, Solange, qui est actuellement décrite comme le prototype de la peste pour avoir entraîné la rupture de George et Chopin. Des scandales, comme lorsqu’elle portait des pantalons et fumait le cigare en public, lorsqu’elle entretenait des relations saphiques avec Marie Dorval. Et puis, bien sûr, des passions plus ou moins orageuses qui font encore rêver, qui sont aussi un fond de commerce florissant pour les cinématographes et les Monuments nationaux : Jules Sandeau, à qui elle doit son nom, Alfred de Musset, qu’elle trompait avec le docteur Pagello après avoir été elle-même trompée avec des prostituées de Venise, Frédéric Chopin, de qui elle fut plus la mère, la sœur, l’infirmière, que la maîtresse…

George Sand ramène à elle tous les plus grands artistes du XIXe siècle, c’est sans doute pour cela, aussi, qu’elle fascine. A Nohant se sont côtoyés des génies du siècle… ou doit-on parler d’ « Enfants du Siècle » ? Grande enfant, cette George ? Peut-être, lorsqu’on lit ses contes, ou même ses romans comme la Petite Fadette, Cendrillon du XIXe. Peut-être aussi lorsqu’on visite le théâtre, où elle aimait jouer et mettre en scène dans un décor de poupée, et que l’on admire le théâtre des marionnettes de son fils Maurice, marionnettes qu’elle aimait habiller. Mère attentive aussi, qui a fait planter deux grands chênes pour la naissance de ses enfants, et qui a demandé à les voir en mourant. Grand-mère gâteau qui aimait faire des confitures avec les fruits de son jardin. Et puis ses dernières paroles avant de s’éteindre en 1876 : « Laissez verdure »... 

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Commentaires
P
Il paraît même qu'elle aurait dit que faire des confitures demandait autant d'attention, sinon plus, que d'écrire un livre ! (dixit le petit guide de Nohant.) Il faut dire qu'à l'époque, il n'y avait pas encore de Vorwerk !
L'Histoire n'est qu'une histoire à dormir debout
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